Si J.S. Bach m’était conté… Episode 4
Les pensées d’Ambrosius.
Chapitre 1
http://www.youtube.com/watch?v=bXwHORPeOsg
Johann Ambrosius Bach regardait, non sans fierté, ce dernier-né que lui avait donné son épouse tant aimée Elisabeth, juste deux jours auparavant…
Il pouvait dormir à présent ce coquin, après s’être bien fait remarquer à la Georgenkirche de notre bonne ville d’Eisenach, où il avait reçu son baptême !
Les murs de cette église qu’Ambrosius connaissait bien, car il y dirigeait la musique instrumentale en compagnie de son cousin Johann Christoph, l’organiste le plus doué que la famille Bach ait engendré jusqu’à présent, en avait vu bien d’autres. Et puis, une église sans cris d’enfants, est-ce vraiment une église ?
Pour fêter l’évènement, il ne fallait pas moins qu’un banquet réunissant famille et amis, dont les deux parrains : Johann Georg Korch, garde forestier du Duché d’Eienach et Sebastian Nagel, stadpfeifer (joueur de fifre) à Gotha.
Mais… Faisons-nous « petite souris », et imaginons ce qui se dit dans la maison natale du petit Jean-Sébastien, ce 2 avril 1685…
« Quel paradoxe ! Protester avec autant de virulence pour quelques gouttes d’eau purificatrices, quand on porte le nom de Bach… »
Ainsi parlait Johann Georg Korch de son filleul à Ambrosius, qui lui répondit en remplissant généreusement son verre :
« Buvons et rendons grâce à Dieu d’avoir donné à mon fils une telle énergie. »
Une autre voix se fit entendre, celle du deuxième parrain, Sebiastian Nagel :
« Et de si puissantes cordes vocales ! »
Ambrosius :
« Élément non négligeable pour l’intégrer, dès que possible, dans notre chorale… »
Johann Georg Korch :
« Éternels incorrigibles êtes-vous, Messieurs les musiciens, victimes de cette déformation professionnelle qui n’appartient qu’à vous ! Et si vous laissiez à mon filleul le temps de grandir un peu : serait-ce un effet de votre bonté ?!?
(il se retourne)
Qu’en pense son oncle, notre éminent et non moins talentueux organiste Johann Chrisptoph ?… »
En effet, celui-ci venait de faire son entrée.
Il répondit d’un air distrait :
« Plaît-il ? Oui, ho ! Sans aucun doute… »
En fait, il n’avait rien écouté de cette conversation dont le sujet était bien le dernier de ses soucis.
Ambrosius, intrigué :
« L’amertume se lit sur ton visage.
Conte-moi tes chagrins … »
Johann Cristoph :
« Conter, hum… « Compter », oui… Tout est là !
Quelques créanciers indélicats ne cessent de se rappeler à mon bon souvenir, tandis que la ville tarde à me régler les salaires qui me sont dus, ainsi que quelques débiteurs dont il me faudrait soigner l’amnésie.
Ces détails sordides n’auraient qu’une importance insignifiante, s’ils n’avaient pour conséquence de me voir menacé d’être bientôt délogé de ma maison ! »
Ambrosius :
« Tu mènes grand train de vie, nous en avons déjà discuté… Peut-être serait-il salutaire de renoncer à certaines ambitions, te rappeler que nous sommes tributaires de ceux qui nous emploient et nous donnent rémunération, non le contraire. »
J. Christoph :
« Tu parles d’or (celui qui me fait défaux) comme tous les Bach, mais il nous faudra bien rompre un jour avec ce statut de « larbins », si dorées soient les cages qu’on nous affecte !
J’ai croisé, chemin faisant, un des éminents membres du Conseil Municipal qui m’a confirmé que ma demande d’augmentation de salaire était refusée, une fois de plus…
Un jour je me lasserai d’Eisenach et de ces notables, dont l’avarice n’a d’égale que leur incompétence !!! »
Ambrosius :
« Chut ! Ne parle pas trop fort, il en est quelques-uns ici et nous devons composer avec… »
J. Christoph, retrouvant un léger sourire :
« Hum ! « Composer », tu l’as dit… Mais que faire avec de tels sujets ? Leur contrepoint sonne si faux… »
Ambrosius :
« Joli trait d’esprit, ce qui n’a rien pour m’étonner d’ailleurs ! Tu es le plus brillant d’entre-nous, mais le plus ruiné aussi, parcequ’il y a un élément que tu t’obstines à ignorer : « la raison »… »
J. Chrstoph faisant la moue :
« La raison ? Mais quelle horreur, tu parles toi aussi comme un comptable !!! »
Ambrosius, lui sevant un verre à son tour :
« Installe-toi et buvons ce nectare, dont notre Seigneur a dit que c’était son sang !
Il nous aidera à avoir confiance en demain… »
J. Christoph :
« Ho ! Ce n’est pas Dieu et encore moins son fils qui me posent problème, ce sont les hommes : ces mortels qui nous tuent à petit feu… »
Johann Christop Bach, fils aîné d’Henrich, était effectivement le musicien le plus doué de la famille… Du moins avant que son neveu ne se mette à composer à son tour, bien plus tard.
Voici la musique qui berça les premières années du petit Jean-Sébastien :
http://www.youtube.com/watch?v=2j7UkErBOxQ
A suivre…