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( 31 juillet, 2012 )

Nineties : « Puisqu’il fallait bien continuer… » (39ème partie/C)

Troisième partie : Actes 5 & 6

Nineties :

Acte 5

 

 dans Et mes souvenirs deviennent ce que les anciens en font.

Sigmund Freud (1856-1939)

1925 regarde les pages de son éphéméride s’effeuiller tranquillement au fil des jours…

 

« Théophraste, tu n’as presque pas touché à ton assiette !

Ils ne sont pas bons mes ris de veau ?!? »

Ainsi parlait Fulbert Ronsignac, ami de longue date du susdit et patron du café où il était venu se ressourcer un peu.

Théophraste, très mélancolique :

« Ils sont on ne peut plus exquis, précieux camarade… »

 

Fulbert, faisant la grimace :

« Hum : ton appétit en est la preuve vivante ! »

 

Théophraste :

« N’ait crainte, ta cuisine n’est nullement en cause, mais il se trouve que j’ai quelques contrariétés… »

 

Fulbert, tirant une chaise, prenant place et reservant du vin à Théophraste :

« Raconte-moi, « ma vieille » !

Cela ne pourra pas te faire de mal, comme ce Saint-Emilion à damner les Dieux que je t’ai sorti de « derrière les fagots » du reste, à défaut de te faire du bien.

Et puis on ne sait jamais : paradoxalement, il s’avère que c’est souvent les éléments « extérieurs » qui aident à régler nos « problèmes internes »… »

 

 dans Saga familiale

« Ha ! voilà des paroles comme j’aime à en entendre dire !!! »

 

Théophraste, surpris :

« Mais qui parle ?!? »

 

Fulbert, le visage pétillant :

« Professeur Azincourt, vous étiez sur la place et mon personnel ne m’en a touché mot…

Je m’en vais de ce pas vilipander ces petits chenapants !!! »

 

Azincourt :

« Ne vilipandez point : je demande la clémence pour ceux des vôtres qui n’ont fait que respecter mon désir d’anonymat ! Ils sont vos fidèles soldats possédant bien plus d’honneur que nombre de notables…

Et puis de grâce, cessez de m’appeler  »professeur », j’en sais que cela pourrait offusquer… Vous savez bien, je vous l’ai assez répété, que mes pairs ne m’ont jamais accordé ce titre ronflant et pantouflard, apanage de cette gloire « obséquieuse », qui permet à moutl collègues d’espérer voir quelques pigeons se soulager sur leur statues érigées en place publique, avant qu’on ne leur développe ce tapis rouge, aboutissement d’un fantasme narcissique mais qui n’est, à mon sens, rien d’autre que l’antichambre de la mort !!! »

 

Fulbert  à Théophraste :

« Le Professeur Azincourt est à la médecine populaire ce que « Cyrano de Bergerac » est au théatre : un véritable bonheur, une bénédiction faite homme !!! »

 

Azincourt :

« Modérons les entousisames, de peur que mon ego ne se surdimentionne à l’excès ! »

Il prend un temps de réflexion, puis reprend :

« On se souvient de 1515 dans la mémoire collective, car personne n’a oublié « Marignan »… »

 

Théophraste :

« Je ne saisis pas le rapport, cher Maître… »

 

Azincourt, souriant :

« Vous en êtes un autre !

Etre adulé de telle sorte aujourd’hui et en ce lieu, c’est comme un pied-de-nez que donnerait « Dame Nature » pour se faire pardonner en mon endroit pour « sévices rendus »…

 

Théophraste :

« Vous avez voulu dire « services », je pense ! »

 

Azincourt :

« Absolument pas, mais vous allez comprendre :

je porte hélas, tel un boulet, le nom d’une bataille qui se déroula un siècle avant les exploits du Chavalier de Bayard.  »Azincourt » fut, comme vous ne sauriez l’ignorer, un désastre pour la France. Certains nationalistes chagrins tentèrent quelques mots d’esprit à ce sujet, ce qui leur valut plusieurs contusions et blessures : je ne fut jamais homme à baisser la tête sous l’injure, et Monsieur mon Père, ex-militaire vétéran de la guerre de 1870 devenu maître d’armes, m’enseigna l’art de l’escrime et de la lutte, ce qui fut bien utile pour tancer ces poupées de chiffon dont la seule gloire est de se fourvoyer dans les salons, du moins ceux qui eurent l’inconscience de me provoquer en duel !

Bon prince, je me suis toujours contenté de les blesser. L’un d’eux, très fine lame qui me posa problème put continuer l’escrime un moment, mais il dû mettre les drapeaux en berne pour la descendance qu’il n’aura plus jamais, suite à une esquive mal négociée…

Ho : je crois qu’il m’en a gardé grief !!!

(Hilarité de la salle)

Pour ne parler que du siècle dernier (19ème), le chiffre « 15″ fut loin d’être  »porte-bonheur » pour le Premier Empire, et ce n’est pas l’honorable

Louis Victor Baillot (1793-1898),

dernier « grognard » de Napoléon 1er mort à 104 ans, qui de sa haute silouette eût pu dire le contraire !!!

J’avais 26 ans quand Monsieur mon Père m’invita à rendre l’utime hommage au dernier survivant de Waterloo dans un petit village de Bourgogne, à Carisay.

Je ne sais pas si cette commune avait vu autant d’âmes sur son sol jusqu’à ce jour…

Félix Faure (1841-1899), qui n’avait pas jugé bon de se déplacer, en était à sa troisième année d’une présidence insignifiante : l’avant-dernière dernière de cet homme

« L’arme du crime » : Marguerite Steinheil (1869-1954)

qui se prenait  pour « César » et qui est mort « Pompée », comme l’a si bien dit

Georges Clémenceau (1841-1929),

grand personnage, lui, ne ratant jamais un trait d’esprit et encore moins un duel : il blessa ce pauvre Deschanel (1855-1922) encore député à l’époque et devenu plus tard Président « très fantasque », celui-là même qui, posté sur les branches des arbres de l’Elysée, imitait le cri des corbeaux lorsqu’il ne tombait pas du train, vetu d’un pyjama !!! »

 

Théophraste, hilare :

« Vous me feriez un grand honneur, mon cher Maître, si vous acceptiez de vous joindre à nous ! »

 

Azincourt, souriant :

« Ma foi, la chose est parfaitement envisageable… »

Il regarde la bouteille largement entamée de Saint-Emilion et dit :

« Mais permettez-moi d’apporter ma contribution en vous offrant la soeur jumelle de cette délicieuse fiole ! »

 

Fulbert :

« Un Saint-Emilion qui marche pour la douze !!!

Et tu vas me faire le plaisir de terminer tes ris de veau pendant qu’il sont encore chauds, sinon, je me fâche ! »

 

Théophraste :

« Bien patron… »

 

Azincourt, alors qu’un garçon porte son assiette tandis qu’un autre lui tend une chaise :

« Notre brave Fulbert est un artiste né : ses ris de veau sont à tomber par terre, quant à ses tripes à la mode de Caen (le plat que j’ai choisi aujourd’hui), c’est comme qui dirait, pour le palais, l’incarnation de la volupté suprême !!! »

 

Théophraste, de nouveau mélancolique :

« Hum, ça aide à faire oublier le reste… »

 

Fulbert, après un léger soupir :

« Et voilà, ça le reprend !!!

Explique-donc au Professeur ce qui te fait tourment , c’est un spécialiste du comportement qui a des solutions à tout. »

 

Azincourt :

« Votre confiance me flatte, mais la psychologie est loin d’être une « science exacte » !

Le jour où vous trouverez deux analystes capables d’aborder un même sujet, sans être tenté d’en référer

le lendemain au petit matin sur le pré, armes à la main,

vous m’en ferez part : j’aimerais bien savoir à quoi cela ressemble au moins une fois dans ma vie…

 

Théophraste :

« Vous ont ils provoqué parfois en duel ?!? »

 

Azincourt :

« Que nenni, c’était une galéjade !!!

Ils sont beaucoup trop couards pour avoir envisagé la chose, du moins sur ce terrain-là…

Leur courage est à l’image de leur domaine de compétence, ne passant que par l’autoflagellation, ce qui fait beaucoup moins mal qu’une blessure infligé par un adversaire. »

 

Théophraste, se tenant le menton :

« Si j’osais, je vous poserais une question qui me brûle les lèvres… »

 

Azincourt :

« Mais osez mon cher, ne soyez pas timide !

Quant à vos lèvres (il montre la bouteille de Saint-Emilion), nous avons le remède à l’incendie ! »

 

Théophraste, souriant :

« Que pensez-vous de Sigmund Freud et l’avez-vous rencontré ? »

 

Azincourt, fronçant les sourcils :

« J’ai croisé la route de cet individu en 1910. Il était en voyage à Paris, mais l’insignifiant médecin que j’étais n’eut pas le don de susciter en son endroit un quelconque intérêt… Pas plus que je ne l’ai en estime en qualité d’être humain ! »

 

Théophraste, sondant le regard d’Azincourt :

« Vous m’en avez trop dit ou pas assez, Docteur…

Que lui reprochez-vous au juste ? »

 

Azincourt, le regard dans le vague :

« Les fantômes qu’il a laissés au bord de sa route, dont un était de mes amis :

Victor Tausk (1879-1919) !!!

l’armée fit de nous des médecins militaires, mais hélas pas dans le même camp : il était en face.

Il avait en lui cette humanité qui fait toute la différence, étudiant les phénomènes de désertion dans le cadre des psychoses de guerre.

Sa vie ne fut que douleur, marquée par la pauvreté, la maladie et la dépression…

Nous sommes plusieurs « collègues de l’ombre » à le considérer comme l’un des pionniers de la psychanalyse, mais la postérité ne retiendra que le nom de  »Sigmund Freud » : ce médicastre mondain !!! »

 

Théophraste :

« Hé-là, comme vous y allez ! »

 

Azincourt :

« Victime de mon tempérament, comme toujours !

Quoi qu’il en soit, j’affirme que Freud, jaloux de l’intelligence de Victor, l’a sciemment écarté de sa route car il lui faisait de l’ombre, au « grand homme »…

Cela ne l’a rendu que plus malheureux, il s’est suicidé en 1919 : fin de transmissions ! »

 

Théophraste, faisant la moue :

« Vous me voyez déçu, car le portrait que reflète aujourd’hui

Monsieur Freud, fort de ses 69 ans,

donne plutôt l’apparence d’un honorable grand-père à qui on peut parler en toute confiance… »

 

Azincourt, le sourire ironique :

« Ha ça, vous pouvez lui parler : il suffit d’en avoir les moyens !!!

Trois ans avant ce siècle, ayant obtenu mon diplôme, j’entrai définitivement en médecine comme on entre en église, ayant pour seule bible le « Serment d’Hippocrate », mes ouailles étant aussi bien les vulnérables et les plus démunis que les plus riches (qui le sont bien moins quand la santé les abandonne)…

Ma conception de l’humain et des soins que je peux apporter à chaque âme passe par l’équité.

Monsieur Freud, lui, affirma dans une de ses publications et sans honte, que « les honoraires du psychanalyste sont un moyen de vivre et d’aquerrir de la puissance. »

Je croyais chauchemarder !!!

Les médecins ne seraient-ils rien de plus que des épiciers de luxe, réservé à une élite ?!?

Et il en remit plusieurs couches dans le tableau de mes horreurs :

« les paiements des analyses doivent s’effectuer en liquide et à dates fixes… »

Comme si ce n’était pas suffisant, voici l’estocade :

« Les honoraires doivent être élevés pour que le patient ait l’impression que la cure a de la valeur ! »

Ainsi, cette importance donnée par « le maître » aux revenus psychanalytiques exclut de soigner les malades pauvres !!!

Dire que ce triste sire a fait le même serment que moi : nous ne devons pas en avoir la même interprétation…

Mais je suis un incorrigible bavard : si vous me parliez de votre problème ?

Je suis tout ouïe ! »

 

Théophraste, regardant sa montre à gousset :

« Et si nous en parlions plutôt en ma demeure ?

Je constate qu’il est déjà bien tard et que tous les clients sont partis.

Notre ami Fulbert, a droit lui aussi à sa vie privée… »

 

Azincourt, sortant une liasse de billets qu’il tend à Fulbert :

« Se récréer est un des besoins fondammentaux dont je ne saurais priver notre Maître Queux ! »

Il fait un clin d’oeil au restaurateur puis reprend :

« N’y voyez aucune allusion psycho-freudienne ! »

 

Fulbert :

« Ho, Professeur !!! »

 

Azincourt :

« Voici pour les deux repas, permettez-moi de vous inviter, mon cher Théophraste… »

 

Théophraste :

« Ha diantre, vous m’avez pris de court !

La prochaine fois, ce sera pour moi… »

 

Tandis que les deux prennent congé, Fulbert se dit :

« N’empêche que je reste sur ma faim, moi, ce qui est le comble pour un restaurateur !

Dans cette histoire, je serai le seul à ne pas savoir pourquoi mon ami Théophraste était si triste… »

Acte 6

  »Ces ampoules électriques sont bien pratiques, mais elles n’ont pas le charme des chandelles d’autrefois, et une certaine nostalgie m’étreint lorsque je repense à la bonne lampe à pétrole de mon enfance… »

Ainsi parlait Théophraste Bonneville, ayant convié le Docteur Hippolite Azincourt à entrer dans son salon, qu’il venait d’éclairer à l’aide d’un simple interrupteur.

Azincourt, pensif :

« L’esprit de l’Homme n’est qu’un amoncellement de paradoxes.

En effet, il fait tout pour s’évader d’un passé auquel se raccroche…

Votre canapé a bougé ! »

 

Théophraste, décontenancé par la dernière phrase :

« Le canapé qui bouge ?!?

Ha oui !

Vous utilisez la technique « nouvelle vague » de ces littéraires surréalistes, en improvisant une parabole qui à première vue est hors sujet concernant le  »paradoxe », qui vous est venue spontanément …

J’ai entendu parler de ça : « le fonctionnement réel de la pensée », « le psychisme automatique pur ».

Je ne vous imaginais pas adepte de ce jeune écrivain en vogue que l’on nomme

André Breton (1896-1966)…

Azincourt, amusé :

« Vous faites preuve d’une créativité tout à fait remarquable et les arcanes de votre raisonnement n’ont rien à envier à ces pseudo-intellectuels qui se font les chantres d’une philosophie des temps nouveaux, à supposer que c’en soit !

Mais dans le cas qui nous intéresse, mon observation n’était que purement cartésienne, car je vous parle d’un meuble, le vôtre en l’occurence, où un être vivant semble avoir pris place sous la couverture, sans plus.

Cependant, si vous souhaitez que je vous sorte une parabole, je peux aisément en créer une sur le thème du « canapé », vecteur de l’ascension sociale de certains analystes… »

 

Théophraste s’approche du canapé et soulève la couverture.

Il découvre Chimène endormie et dit :

« Que fais-tu là mon bébé ?!? »

 

Chimène, émergeant du sommeil et agressive :

« Je t’ai déjà dit de ne plus m’appeler comme ça !!! »

 

Azincourt, s’adressant à Chimène avec un large sourire, essayant de détendre l’atmosphère :

« Enchanté ! Et moi c’est Hippolite Azincourt… »

 

Chimène, se tenant la tête :

« Tant mieux pour vous !!! »

 

Théophraste, indigné :

« Dis-donc ma fille, c’est comme ça que je t’ai élevée ?!? »

Il s’adresse à Azincourt :

« Excusez-là, elle est…

Heu…

Elle est… »

 

Azincourt :

« Elle est ce problème dont vous vouliez me parler, je l’ai parfaitement subodoré…  »

Théophraste relève le menton de sa fille qui proteste :

« Lâche-moi… »

 

Théophraste, fronçant les sourcils :

« C’est bien ce qu’il me semblait : tu as bu de l’alcool !

C’est d’ailleurs la seule explication à ton agressivité, toi qui n’en boit jamais !!! »

 

Chimène, en pleurs :

« Laisse moi me détruire !!!

De toute façon ma vie ne vaut plus rien… »

 

Théophraste très attristé :

« Ne dis pas ma petite fée !!!

Ta vie vaudra ce que tu en feras…

Elle a déjà sauvé la mienne par sa seule présence.

Sache que je ne serais plus qu’un nom et une date à côté de celui de ta Maman, gravé sur cette triste plaque de marbre sous laquelle elle repose, si elle ne m’avait pas fait le plus beau cadeau du monde : celui de ton existence ! »

 

Chimène, se jette dans les bras de son Père qu’elle serre de toutes ses forces, éclatant en sanglots contre la poitrine paternelle.

 

http://www.youtube.com/watch?v=Hdlz6QzyAVA

 

Théophraste, essuyant discrètement les larmes coulant sur son visage, fait assoir Chimène, chancelante, sur le canapé.

Se reprenant, il dit :

« Tu avais pourtant pris de bonnes résolutions, quelquechose m’échappe…

Ne devais-tu pas faire amende honorable en te réconciliant avec René, à l’occasion de ce bal ?

Que s’est-il donc passé ?

Qu’as-tu encore fait, mon enfant ? »

 

Chimène, s’allongeant sur le canapé :

« Je ne sais plus, tout s’embrouille dans ma tête… »

 

Azincourt demande à Théophraste de s’éloigner, approche une chaise à côté du canapé puis s’assoit. Il sort une montre à gousset de la poche de son gilet et la met devant le visage de chimène, se disant à lui-même :

« On aura beau dire, la bonne vieille technique du « Père Charcot », il n’y a que ça de vrai ! »

Puis s’adressant à Chimène d’une voix calme, sous les yeux médusés de Théophraste :

« Vous ne voyez que cette montre… Vos membres deviennent lourds, vos paupières aussi… »

Il compte lentement à rebours à partir de dix, hypnotisant ainsi Chimène qui affiche un regard totalement décontracté.

Azincourt, sortant un carnet de note et un crayon :

« Vous êtes en route pour aller à ce bal… Qu’avez-vous à l’esprit à cet instant ? »

 

Chimène :

« Je t’ai fait du mal…

René, pardonne-moi !!!

Je t’aime…

Je t’en supplie, pardonne-moi mon amour !!! »

 

Azincourt :

« Que lui avez-vous fait ? »

 

Chimène :

« Pour le rendre jaloux, je suis sorti aux bras de Célestin. »

 

Théophraste, affligé :

« Le fils de la bonnetière que tout le quartier appelle « la veuve joyeuse »…

Celui-là, elle l’a vraiment trié sur le volet, car dans la mémoire collective, voire même dans l’histoire de l’humanité, je ne crois pas qu’on ait trouvé plus con !!! »

 

Azincourt, faisant signe à Théophraste de se taire :

« Pourquoi vouliez-vous le rendre jaloux ? »

 

Chimène :

« Il y a quelquechose à l’intérieur de lui qui refuse tout l’amour que je lui offre.

On dirait qu’il a honte, comme s’il se sentait coupable

d’avoir commis un acte inavouable… »

 

Théophraste, à l’oreille d’Azincourt :

« On marche sur la tête, la !!!

Mais que lui faut-il de plus ?!?

Je l’ai traité comme un fils.

Et quand les deux ont « franchi le pas », j’ai accepté la situation avec bonhomie, quand certaines badernes auraient sorti le fusil, particulièrement quand j’ai trouvé « Monsieur » dans la baignoire, tandis que Mademoiselle (qui ne l’était plus !) était nue sous son peignoir…

J’étais tellement heureux du bonheur de « mes deux enfants » !

Quand on voit le résultat, vous parlez d’une réussite :

depuis, les deux sont devenus complètement neurasthéniques, c’est à n’y rien comprendre… »

 

Azincourt, notant sur son carnet les remarques de Théophraste :

« Hum-hum… Intéressant !

Pour la compréhension, nous devons respecter deux stades préliminaires incontournable…

Je vous expliquerai le moment venu. »

Puis se retournant vers Chimène :

« Quand il vous a vu avec ce Célestin, comment a-t-il réagit ? »

 

Chimène :

« Pauvre chéri, j’ai vu toute la détresse du monde dans son regard…

Depuis, il ne m’a plus adressé la parole, et j’en meurs un peu plus chaque jour !!!

Je ne sais pas quels sont ces démons qu’il a en lui, mais en lui ouvrant mes bras et mon coeur, je pensais les chasser avec le temps… »

 

Azincourt :

« Et vous croyez que ce n’est plus possible ? »

 

Chimène, dont les larmes coulent :

« Plus depuis ce bal !!! »

 

Azincourt :

« Pourquoi dites-vous cela ?

Que s’est-il passé ? »

 

Chimène :

« Des amis communs avaient fini par convaincre René de les suivre dans ce dancing, ce qui était un exploit lors qu’on sait qu’il n’aime ni la musique et encore moins la danse…

Une fois passée la porte, j’ai voulu me précipiter vers lui, lui criant tout mon amour et prête à me jeter à ses pieds en implorant son pardon, et… »

Les sanglots la reprennent…

Azincourt :

« Et ?… »

 

Chimène :

« Il y avait « Alice », cette Anglaise au charme rafiné,

et l’objet de mes amours qui lui tenait conversation…

René, que j’avais laissé si désemparé à la suite de ma stratégie complètement idiote, affichait un regard plein de lumière, que lui reflétait cette orpheline arrivé en terre de France à l’âge de cinq ans avec son petit frère.

Elle avait coiffé « Sainte Catherine » deux ans plus tôt, mais ces deux années de plus ne semblaient pas être un problème pour mon René !

Je me serais damné, j’aurais été me perdre jusque dans les antres de l’enfer, pour inspirer ce regard qui unissait devant moi ces deux-là !!!

Ils se sont pris la main, ils ont dansé…

J’ai compris dès cet instant que ma vie ne serait plus qu’un long hiver, pour le temps qu’il me restait à vivre… »

 

Théophraste, se livrant à une tentative d’humour que l’on sort dans les situations les plus désespérées :

« Si l’Anglais est sur la place, la défaite est inéluctable !!!

Ce n’est pas vous qui pourrez dire le contraire, n’est-ce pas mon cher Azincourt ?!? »

 

A suivre…

( 20 juillet, 2012 )

Un vrai romantique égaré au XXIème siècle : ça existe donc encore ?!?

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Je suis tombé sur cette vidéo de You Tube alors que j’étais en recherche de documentation concernant les années 1920-25

Un vrai romantique égaré au XXIème siècle : ça existe donc encore ?!? dans Ha ! On est bien...

pour écrire ma « 39ème/C »…

Belle surprise que découvrir un romantique rendant un vibrant hommage au charme et à la beauté d’une actrice du cinéma muet, dont j’ignorais jusqu’à présent l’existence :

 dans Ha ! On est bien...

Pina Menichelli (1890-1984)

Après 1924, elle se consacra à sa vie d’épouse et de mère de famille. Elle s’éteignit à 94 ans dans l’indifférence générale, comme beaucoup de ses congénaires.

Gloire à cet anonyme (dont l’amour est d’autant plus beau qu’il est inaccessible !) de nous rappeler que si une étoile est éphémère à l’échelle de l’univers, sa lumière et sa beauté ne s’éteindra jamais tant que la mémoire existera…

( 16 juillet, 2012 )

Adieu Tatie !!!

Image de prévisualisation YouTube

Tu étais l’affreuse  »Tatie Danielle » (1990), mais avant tout une de ces actrices délicieuses et aimées de ses élèves, dont ceux qui devaient former la célèbre troupe du splendid :

- Gérard Jugnot

- Michel Blanc

- Christian Clavier

- Anne-Marie Chazel

- Thierry Lermitte

pour ne citer qu’eux…

 

Adieu Tatie !!! dans Hommages et coups de gueule !

Tsilla Chelton (1918 – 2012)

 

Tu fis tes débuts sous la compagnie de Marcel Marceau, puis interpréta onze pièces de Ionesco, avant de devenir une actrice incontournable que se disputaient cinéma et télévision, après le succès connu à 71 ans grâce à « Tatie Danielle »…

 

 dans Hommages et coups de gueule !

 

 Que le chemin qui te mène vers l’éternité soit parsemé des pétales de roses, car tu seras toujours dans nos coeurs, comme le sont ceux que tu as côtoyé dont le souvenir ne s’effacera jamais…

 

http://www.youtube.com/watch?v=rrVDATvUitA

 

( 8 juillet, 2012 )

Nineties : « Puisqu’il fallait bien continuer… » (39ème partie/B)

Deuxième partie Actes 3 & 4

Nineties :

Acte 3

 dans Et mes souvenirs deviennent ce que les anciens en font.

« Si je vous gêne, n’hésitez-pas à me le dire, jeune homme !!! »

Ainsi parlait Chimène à René qui venait de faire intrusion dans la salle de bain du Sieur Théophraste Bonneville, dans le but de se rafraîchir.

Installée dans la baignoire, elle était (en toute logique) dans le plus simple appareil, dissimulant sa poitrine à l’aide de sa main gauche et son intimité de l’autre…

René, après avoir sursauté et ne pouvant dissimuler son trouble :

« Ha mon Dieu !!! »

 

Théophraste, entrant à son tour :

« Ha son… Ha sang de Dieu !!!

Tu étais donc là, ma fille ?!? »

 

Chimène :

« Après avoir fait le ménage, repassé le linge et mis notre gigot dominical au four, je m’étais octroyé quelqu’instants de détente, prenant ce bain froid pour lutter contre cette chaleur insoutenable.

Je me devais d’être présentable pour notre invité ! »

 

Théophraste, pensif :

« Très bonne initiative.

Mais en parlant de ça…

Avez-vous remarqué, mes enfants, que le temps devient de plus en plus anarchique ?

A l’image des hommes, du reste ! »

 

René, encore rouge de confusion, tournant le dos à Chimène pour en respecter la pudeur :

« Il est vrai que l’hiver a été particulièrement doux en ce début d’année (1921), et ce n’est qu’en avril qu’il s’est mis à neiger : c’était assez surréaliste ! »

 

Théophraste :

« Comme tu dis…

Et juste après, le thermomètre s’est remis à grimper !

On ne m’ôtera pas de l’idée que toutes ces technologies modernes, dont la Grande Guerre a servi d’étal, n’est en rien responsable de cette variation climatique hors norme… »

 

Chimène, fronçant les sourcils :

« Papa ! »

 

Théophraste :

« Oui ma fille ? »

 

Chimène :

« As-tu remarqué ma tenue ? »

 

Théophraste, complètement à l’ouest :

« Oui, et alors ?

C’est celle que tu avais à ta naissance, mais je te rassures : tu as bien grandi depuis et je suis fier de te dire que tu n’as pas à en avoir honte… »

 

Chimène atterrée :

« Je te remercie, mais penses-tu que ma posture en ce lieu soit adéquate pour participer à une conférence concernant « l’influence de l’industrie sur la météorologie à travers les âges », et ce : en présence d’une tierce personne ?!? »

 

Théophraste, réalisant le paradoxe, mettant sa main à la bouche :

« Mille excuses, mon petit lapin bleu !!! »

 

Il invite René à rejoindre le salon, tandis que Chimène, sortant du bain, lui dit :

 dans Saga familiale

« Peux-tu éteindre le four, Papounet, et sortir le gigot ?

Surtout, fait bien attention de… »

 

Théophraste :

« Aïe !!! »

 

Chimène, levant les yeux au plafond :

« Trop tard…

Je voulais dire de ne pas te brûler en prenant le plat avec un torchon ! »

 

Tandis que René « prend le dossier en main », théophraste souffle sur les siennes en disant :

« Oui, et bien… On ne peut pas être doué pour tout :

je suis photographe,

si j’étais une fée du logis, ça se saurait !!! »

 

René, très concentré, observant un plat de légumes qui mijotait :

« Je pense qu’il serait judicieux d’éteindre le feu sous cette marmite… »

Soulevant le couvercle, ses yeux s’illuminent :

« Je n’ose y croire : des flageolets verts !!! »

 

Théophraste, donnant un verre de porto à René :

« Tradition familiale qui nous vient de feu mon épouse…

En cette demeure, un dimanche ne se conçoit pas sans un gigot (piqué à l’ail, cela va sans dire mais beaucoup mieux en le disant), et ses flageolets-verts !

Au risque de passer pour un mécréant, j’affirme que ça vaut bien toutes les messes commémoratives du monde. »

 

René, empreint d’une soudaine nostalgie :

« Votre épouse, paix à son âme, semble être partie beaucoup trop tôt, à l’image de ma Maman !

Ce fumet me rappelle mes souvenirs d’enfant, ceux des jours heureux quand j’étais dans ses jupes, à la regarder cuisiner… Je l’ai perdue alors que j’allais avoir huits ans… »

 

Théophraste :

« Pauvre petit, que le destin est cruel, parfois !

Chimène avait pratiquement le même âge quand sa Maman décéda des suites d’une pneumonie, en cette douloureuse année 1910…

La Seine se mit à déborder, inondant Paris comme si elle s’était associée à notre chagrin, joignant ses larmes à celles de ma petite « Chichounette » et aux miennes !

Depuis, j’ai élevé ma Chimène tant bien que mal…

Plutôt bien que mal, quand j’y pense ! »

 

René, sondant le regard de théophraste :

« Quand vous dites « plutôt bien », je ressens comme une restriction, un doute quelquepart… »

 

Théophraste :

« Lirais-tu dans les âmes, fils, comme ce Monsieur Freud que l’on s’arrache dans les chroniques mondaines ?!?

Chimène sera toujours ma petite fille.

Elle a eu dix-neuf ans cette année, ce qui veut dire que dans deux ans, elle sera majeure… »

 

René, souriant :

« Cela arrive à des gens des bien, vous savez ! »

 

Théophraste, mettant affectueusement sa main sur la nuque de René :

« Un peu de sérieux, gamin…

Tu sais, il arrive un moment où l’oiseau doit quitter son nid, même si ça doit déchirer le coeur du Papa oiseau… »

 

René :

« J’ai cru comprendre, en écoutant vos dires chez ma Tante, que « Papa oiseau » n’aura pas le coeur déchiré avant un bon moment ! »

 

Théophraste :

« Aïe-aïe-aïe, tu l’as dit mon gars !!!

Lorsque ma pauvre Edmée rejoignit un monde « meilleur », comme aiment à le qualifier les bigotes de service, ma tendre Chimène se mit en devoir de protéger son « petit Papa » du monde extérieur…

C’est ainsi qu’au fil des ans et sans que je m’en aperçoive, elle s’est appropriée le titre de « Maîtresse de Maison », faisant fuir toutes femmes qui souhaitaient m’approcher. »

 

René :

« Si d’entre-elles Chimène a fait fuir les bigotes, vous devez lui en rendre grâce !!! »

 

Théophraste :

« C’est l’aspect le plus positif de la chose, car je n’aurais pas pu concevoir une vie austère ne me permettant de voyager qu’entre le missel et la flagellation, l’acte charnel n’étant réservé qu’à la reproduction et les dimanches à l’eucharistie !!! »

 

René, horrifié :

« Tu m’étonnes qu’elle parlent d’un « monde meilleur », pensant quitter ce quotidien qu’elles ont transformé en enfer et dans lequel elles souhaiteraient tant nous enfermer, ces péronnelles…

 

Théophraste, faisant la moue :

« Allons-allons, jeune homme, un peu de tolérance pour ces « créatures de Dieu » ! »

 

René, remonté :

« Hum… La tolérance : il y a des maisons pour ça !!!

Chacun sa prostitution, et  je ne sais pas quelle est la pire : celle d’un corps sain ou d’une âme flétrie ?!? »

 

Théophraste :

« Hé bien ?!?

Je ne croyais pas un jour rencontrer plus anticlérical que moi…

Je ne sais pas ce que t’ont fait les Jésuites, mais il faudra que tu laisses ton aversion pour la calotte au vertiaire, fils, car le clergé représente une partie non négligeable de mon chiffre d’affaire, et par effet rebond de tes revenus !

J’espère que vous allez vous entendre avec ma fille, car tu as l’air d’avoir toi aussi un foutu carractère…

Depuis qu’elle s’occupe de ma comptabilité et du secrétariat, je n’ai pas pu garder un employé pendant plus de quinze jours : le temps d’épuiser les patiences ! »

 

René :

« Ou de tester les incompétences… »

 

Chimène entre à ce moment dans la cuisine (habillée, cette fois-ci).

René est complètement subjugué par son regard, ce qui semble être réciproque.

Après un court silence, elle dit :

« Ce pourrait-il qu’enfin une personne me comprenne en ce bas monde ?!? »

L’après-midi était déjà bien entamé et nos trois personnages étaient toujours à table.

Un débat faisait rage entre Chimène et son Papa, qui reservait un  »Saint Nicolas de Bourgueil » dans le verre en cristal de René, très amusé de la scène.

Chimène :

« Je vous prends à témoin, René : pensez-vous qu’on ait amélioré la condition humaine depuis le début de ce siècle ?!? »

 

Théophraste, agaçé :

« Fous-lui la paix et ressers-lui un peu de gigot… »

 

René, n’en pouvant plus :

« Merci mes amis, mais en ayant repris trois fois et n’étant doté que d’un seul estomac, je me vois dans l’obligation en son nom de sortir le drapeau blanc, de peur qu’il n’explose !!!

Pour en revenir à ce dont vous parliez, je pense qu’il faudra encore pas mal de temps avant que chaque être humain ne prenne conscience de ce qui fait la véritable valeur des choses.

Je pourrai vous en dire plus dans les mois qui suivent, étant par la force des évènements entré dans le cercle « non fermé » des prolétaires : cette catégorie qui ne possède que sa force de travail sans en avoir les moyens de production, dixit Karl Marx. »

 

Théophraste, joignant ses deux mains comme pour prier :

« Je vais envoyer un coursier chez ta Tante pour dire que tu n’es pas prêt de rentrer ! »

 

René, intrigué :

« Palsembleu ! Et pourquoi donc ?!? »

 

Théophraste, tandis que Chimène fait une grimace à son Papa :

« Parceque tu viens d’entâmer un débat qui va globalement nous emmener jusqu’à demain matin !

J’aurais dû surveiller les lectures de mon enfant qui, je ne sais par quel biais, s’est attachée à la littérature du dit « Karl Marx » dès son adolescence.

Cet homme n’a pratiquement aucun secret pour elle, hélas…

Je dis bien  »hélas », car on peut dire qu’il aura envenimé les relations avec « ma chair » qui, jusqu’à présent, étaient proches de l’harmonie !!! »

Chimène, boudant comme une petite fille :

« Ce n’est pas parcequ’on a une différence d’opinion que nos rapports sont empoisonnés, Papounet ! »

 

Théophraste à René, ce dernier observant Chimène tel un scientifique face à une énigme :

« Peux-tu me dire ce que tu penses, là, à l’instant ?!? »

 

 René, surpris :

« Heu… Et bien…

Je me disais que, compte tenu de la conjoncture, quand la crise de « l’enfance finissante » se conjugue aux doutes des adultes qui contrôlent de moins en moins les mutations dues au modernisme, il ne faut plus essayer de comprendre mais prier !!! »

 

Théophraste, après un long silence, Chimène restant bouche bée :

« Tu as mal à la tête, petit ?…

Il regarde la bouteille de vin et dit :

« L’épicier m’avait prévenu, le Saint Nicolas de Bourgueuil peut avoir des effets secondaires dévastateurs… Surtout avec cette chaleur ! »

 

Chimène, regardant à son tour René comme une « bête curieuse » :

« Ainsi, vous ne voyez pas d’autres alternatives que de prier, vous : l’anticlérical, au lieu de faire face quand une situation devient trop compliquée pour le commun des mortel ?!? »

 

Théophraste, inquiet :

« Et allez-donc, ça la reprend !!!

Dis-moi, ma petite Chimène, tu as fait fuir mon dernier employé au bout de quinze jours…

Serait-ce un effet de ta bonté de laisser au moins celui-là prendre ses quartiers demain, avant de me l’esquinter ?!? »

 

René, très confiant :

« Ne vous en faites pas, Monsieur Théophraste : je ne suis pas du style à me rendre sans combattre…

Puis, s’adressant à Chimène :

« Je suis étonné que vous n’ayez pas saisi le « second degré » dans mon propos, à moins que ce ne soit une feinte de votre part !

Car la prière (que je condamnais sous forme de fausse approbation) n’est autre à mon sens qu’un anesthésiant, destiné à mieux faire accepter la misère des Peuples dominées par la cupidité et l’égoïsme d’une caste aux doigts crochus, que j’espère bientôt voir disparaître… Celle-là même qui devrait avoir honte lorsqu’elle marche devant nos monuments aux morts, sachant qu’elle est en partie responsable du sort de nos familles endeuillées !!!

Mais pour elle, qu’est-ce qu’un être humain, sinon un vulgaire pion que l’on déplace sur l’échiquier de leur barbarie ?!? »

 

Chimène, dont le visage venait se s’éclairer :

« Je pense que nous allons bien nous entendre… »

 

Théophraste, levant les yeux au ciel et marmonant :

« Une fille marxiste sous mon toit, c’était déjà pas facile, alors gérer un numéro de duettistes…

Dieu, si vous passez dans le coin et sans vous commander, venez-donc jeter un oeil : on ne sera pas trop de deux dans ce périple !!! »

 

René :

« Vous priez, Monsieur Théophraste ? »

 

Théophraste, soupirant :

« Non, j’admire mon lustre… »

 

Acte 4

 

Le temps a passé, nous sommes déjà en 1925, au coeur des années folles…

Eudocie, veuve inconsolable du Capitaine Charles-Clément depuis l’année précédente, avait rejoint son militaire d’époux, vaincu une fois de plus dans un dernier champ de bataille qui n’était autre que son lit et la salve ultime une grippe des plus communes.

Rose-Aimé, malgré la tritesse qu’elle ressentait après sa disparition, n’avait pu s’empêcher d’ironiser sur le parcours militaire de Charles-Clément, le résumant par cette épitaphe :

« Décidément : il n’aura jamais gagné une bataille… »

Théophraste Bonneville avait accepté d’accompagner Rose-Aimée au vernissage  d’un photographe et peintre américain âgé de 35 ans, répondant au nom de Man Ray. Selon le « tout-Paris » les oeuvres de cet artiste, débarqué au Havre en 1921, étaient fort prometteuses…

Théophrase, ne pouvant refuser de servir de chevalier-servant à son « amie de toujours », restait cependant dubitatif après l’étude approfondie d’une oeuvre de l’intéressé, exposée parmis tant d’autres.

Pour le pauvre hère figuratif qu’il était, perdu dans le monde décalé d’une « contestation caviar » où le « dadaisme » avait été détrôné par les « hyperréalistes » et les vertues du capital par celle de l’idéologie communiste si bien défendue par sa fille, notre bon Théophraste acquit une certitude :

(Photo de Man Ray)

ce monde marche de plus en plus à l’envers, et la psychanalise du Père Freud ne sera peut-être pas si inutile que cela dans les années, voire les siècles qui suivront !!!

Pendant ce temps, Chimène : cette « lionne indomptable », était serrée contre les bras de René, dans un lit qu’elle n’avait jamais partagé auparavant.

 

Chimène, caressant les cheveux de René :

« A quoi tu penses ? »

 

René, le regard dans le vague :

« Je me demande si on n’est pas en train de faire une énorme bêtise.

Jusqu’à aujourd’hui, tu étais comme une petite soeur pour moi…

Une soeur avec un foutu caractère, j’en conviens, mais ma petite soeur quand même !

Monsieur Théophraste était devenu comme mon Père.

Plus rien ne sera pareil maintenant ! »

 

Chimène :

« Et ça te fait peur ?!? »

 

René :

« Peur ? Ce n’est pas le terme exact… « Gêne » serait plus approprié.

Pour une fois que j’avais trouvé enfin une vie stable et honnête, je m’étais habitué à mon petit train-train, avec pour compagnes les douleurs du passé, certes, mais aussi ma bonne conscience : chose assez rare au sein de ma famille de sang, ce qui m’aidait à faire passer tout le reste !

Après ce qu’on a fait en se cachant de ton Père, comment pourrai-je le regarder en face, maintenant ? »

 

Chimène :

« Parceque tu crois qu’il tombera des nues quand il finira par apprendre qu’on a franchi le pas ?!?

Mais mon pauvre amour, réveille-toi ! Tout le monde le savait pour nous !!! »

 

René, ironique :

« Tout le monde savait ce que nous allions faire dans ta chambre cet après-midi ?

Ils auraient pu m’en toucher un mot, les visionnaires !!! »

 

Chimène, agaçée :

« Ne te fais pas bête que tu n’es… »

 

René, dégageant tendrement une mèche sur le front de Chimène :

« Ne te fâche pas ma belle… »

 

Chimène, les yeux humides :

« J’ai tellement attendu !

Quatre longues années où je me disais :

« Mais va-t-il enfin comprendre que je n’ai jamais voulu être sa petite soeur, qu’il a toujours été pour moi beaucoup plus qu’un frère ?!? »… »

 

René :

« Comment ça : quatre ans ?

Tu veux dire depuis 1921 ?!? »

 

Chimène, baissant les yeux :

« Depuis le premier jour, quand tu es entré dans la salle de bain, j’ai su que c’était toi l’homme de ma vie… »

 

René :

« Ha bon ?!?

C’était pas un peu rapide comme conclusion ? »

 

Chimène, le regardant droit dans les yeux :

« Après ce qui c’est passé tout à l’heure :

ose me dire que tu n’as aucun sentiment pour moi !!! »

 

René, baissant les yeux à son tour :

« Tu sais bien que ce n’est pas possible… »

 

Les deux s’embrassent puis Chimène se lève.

Elle enfile un peignoir et dit :

« Je vais te faire couler un bain, mon chéri… »

 

 

Une heure plus tard…

Théophraste, après avoir ouvert la porte, invitait Rose-Aimée à entrer dans sa demeure.

Rose-aimée :

« Ce « Charles le Catholique » n’a décidément aucune pudeur, s’afficher devant le tout-Paris avec cette « cocotte » et pire, la fille de celle-ci… Il repousse chaque jour les limites de l’horreur !

Je ne pouvais tenir une seconde de plus en présence de ce monstre, j’aurais fini par le souffleter… »

 

Théophraste :

« Calmez-vous ma chère, vous vous faites du mal !

Vous savez que je n’ai pas beaucoup d’estime pour cet homme dont j’ai récupéré le fils, mais je ne crois pas qu’il ait l’étoffe d’un satyre s’adonnant au détournement de mineure, sous l’égide d’une maquerelle.

Cette jeune fille aux allures si timides qui accompagnait cette demi-mondaine doit avoir tout au plus une quinzaine d’années, née donc deux ans après le décès de Ludivine : sommes-nous sûrs que ce Charles, ce veuf si inconsalable, l’ai été autant que cela ? »

 

Rose-Aimée :

« Non ! Vous ne suggérez-pas que René aurait perdu son statut de  »fils unique » depuis 1910 ?!?

Si cette petite devait avoir un lien de parenté avec notre René, la nature lui aurait fait un sacré pied-de-nez, car avez-vous remarqué comment elle égrainait ce chapelet qui semble ne jamais la quitter ? »

 

Charles-Clément :

« Ha oui, maintenant que vous me le dites… On aurait dit une brebis égarée parmis les loups !

Mais chut, j’entends du bruit !!! »

 

A cet instant, Chimène fait intrusion dans le salon, très embarrassée.

Elle dit :

« Papa ? Mais tu es rentré plus tôt !!! »

 

Théophraste, souriant à Rose-Aimée :

« Vous avez vu : elle a de l’observation ma fille, hein ?

Et puis, il est joli son peignoir !

Sers donc quelquechose à boire à notre chère Rose-Aimée pendant que je me raffraîchis un peu le visage… »

 

Chimène, toute rouge :

« Mais ?!? »

 

Tandis que théophraste entre dans la salle de bain, Rose-Aimée, arborant un visage joyeux, embrasse « maternellement » Chimène sur le front en lui disant :

« Alors, tu as réussi à l’apprivoiser, finalement ? »

 

Chimène, troublée :

« A… Apprivoiser qui ?!? »

 

Rose-aimée, serrant Chimène contre son coeur :

« Comme tu es touchante ma petite fille…

Je suis heureuse pour vous deux !!! »

 

Théophraste, sortant de la salle de bain tandis que Chimène était tétanisée, soutenue par Rose-Aimée :

« Au risque de passer pour un vieu jeton, je persiste et signe : en matière d’art,  je préfère La Joconde sans moustache et je suis assez attaché au respect des Maîtres, car il est plus facile de dénigrer que d’inventer… Qu’ils soient « dada » ou « hyper… machins », ce ne seront pour moi que des petits cons qui entraineront la race humaine dans la décadence !!!

Qu’en penses-tu ma fille ? »

 

Chimène, à la limite de l’évanouissement :

« Heu… Si tu le dis… »

 

Théophraste, l’air innocent :

« Au fait : c’est pas René que j’ai vu dans la bagnoire ?!? »

 

Et là, Chimène s’évanouit dans les bras de Rose-Aimée…

A suivre…

( 6 juillet, 2012 )

Hélène : en parlant de Fa Lontaine… Heu : Ta Lonfaine… Mince, enfin de mon auteur préféré !!!

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Hélène : en parlant de Fa Lontaine... Heu : Ta Lonfaine... Mince, enfin de mon auteur préféré !!! dans Ha ! On est bien...

Pierre Repp (1909-1986)

Il est vrai que les fables sont plus facile à conter et la philosophie à traduire quand on ne bafouille pas…

 dans Les facéties de Mésygues

Pas vrai Fabrice ?!?

 

http://www.youtube.com/watch?v=vaTP4_n5KL8

 

Ce petit sujet, chère Hélène, juste pour te faire patienter, car ma « 39ème/B » avance, mais c’est laborieux…

( 1 juillet, 2012 )

« Ca, je n’ai jamais vu !!! »

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Graeme Allwright (né en 1926)

 dans Les facéties de Mésygues

 

J’entre à la maison, l’autre nuit, j’avais bu un peu de vin

J’ai vu un ch’val dans l’écurie où je mettais le mien

Alors j’ai dit à ma p’tite femme:  » Veux-tu m’expliquer

Y a un cheval dans l’écurie à la place de mon bidet ?  »

 » Mon pauvre ami, tu n’vois pas clair, le vin t’a trop saoulé

Ce n’est rien qu’une vache à lait que ta mère m’a donnée  »

Dans la vie, j’ai vu pas mal de choses bizarres et saugrenues,

Mais une selle sur une vache à lait, ça je n’ai jamais vu

La nuit suivante j’entre chez moi, j’avais bu un peu de vin

J’ai vu un chapeau accroché où j’accrochais le mien

Alors j’ai dit à ma p’tite femme:  » Veux-tu bien m’expliquer

Qu’est-ce que c’est qu’ce chapeau-là à la place de mon béret ?  »

 » Mon pauvre ami, tu n’vois pas clair, le vin t’a trop saoulé

Ce n’est rien qu’une vieille casserole que grand-mère m’a donnée  »

Dans la vie j’ai vu pas mal de choses bizarres et saugrenues

Mais une vieille casserole en feutre, ça je n’ai jamais vu

Une nuit plus tard j’entre chez moi, j’avais bu un peu de vin

Sur une chaise, j’ai vu un pantalon où je posais le mien

Alors j’ai dit à ma p’tite femme:  » Je voudrais bien savoir

Pourquoi ce pantalon est gris, le mien est toujours noir  »

 » Mon pauvre ami, tu n’vois pas clair, le vin t’a trop saoulé

Ce n’est rien qu’un vieux chiffon que maman m’a donné  »

Dans la vie j’ai vu pas mal de choses, mais ça c’est un mystère

Un chiffon avec deux tuyaux et une fermeture éclair

En titubant, j’entre chez moi, je suis resté baba

J’ai vu une tête sur l’oreiller qui n’me ressemblait pas

Alors j’ai dit à ma p’tite femme:  » Peux-tu m’expliquer ça

Qu’est-ce que c’est qu’cette tête-là, je n’pense pas qu’c'est moi !  »

 » Mon pauvre ami, tu n’vois pas clair, le vin t’a trop saoulé

Ce n’est rien qu’un vieux melon que grand-père m’a donné  »

Des prix de concours agricoles, j’peux dire que j’en ai eus

Mais une moustache sur un melon, ça je n’ai jamais vu.

 

G. Allwright - 1966

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